Un trop court séjour et une difficulté de contact due à une mauvaise maîtrise de la langue ne m’autorisent pas autre chose qu’une approche « impressionniste ».
La région de Salvador et de l’état de Bahia est la première que les Portugais ont colonisée en débarquant au Brésil. Salvador a été longtemps la capitale du Brésil et sa puissance était liée à la culture de la canne à sucre et donc au travail des esclaves africains déportés là.
Aujourd’hui, Salvador est une ville du Nordeste dont la population est à 80% des descendants des esclaves. Cela est sa particularité : la ville la plus « africaine » d’un Brésil très métissé. On la nomme « la Rome noire », également car on y trouve 365 églises (une par jour !).
Ainsi c’est à Salvador que s’est développé le candomblé, religion propre aux descendants des esclaves africains qui mélangèrent le culte des orishas africains au christianisme des maîtres portugais. La cérémonie est accompagnée de chants et de musique.
Tout comme la capoeira, à la fois art martial et danse, que l’on pratique en musique au son du berimbau (instrument mélodique unicorde) et de deux tambours.
L’influence de l’Afrique est omniprésente dans le rapport quotidien à la musique, dans la vie de tous les jours. Quelques exemples vécus sont parlants. Dans le bateau amarré au port, soudainement, une rumeur incroyable monte de la ville. Un peu d’attention et nous voyons une manifestation défiler sur les quais du port. La musique, émise à fond par les haut-parleurs, encadre les moments où les slogans sont repris avec ferveur par les manifestants. Il s’en dégage un dynamisme inconnu dans nos contrées européennes où les défilés sont plutôt poussifs. Dans les lanchas, bateaux à moteur qui relient les îles de Bahia, la musique est crachée à toute puissance par les haut-parleurs et roule sur la mer, et certains à bord n’hésitent pas à esquisser la samba en pleine traversée !
A Salvador, on aime la musique, omniprésente et puissante. On l’aime aussi belle, authentique, habitée et on ne sait quoi de la qualité et de la quantité l’emporte : ainsi, un chanteur et sa guitare s’exprimant en sourdine à l’entrée d’un restaurant pour appâter les clients fait montre d’une très belle voix et d’une mélodie magnifique.
Pendant le Carnaval, le plus important au monde, la participation et l’engagement de tous est la règle : tout le monde danse et fait la fête ! « Le trio eletrico est une institution bahianaise : orchestre jouant la musique axé, amplifiée par des haut-parleurs, debout sur la plateforme d’un gros camion décoré et illuminé ». (Guide du Routard)
Alors, comment ne pas savourer notre plaisir lorsque devant une « moqueca » (spécialité culinaire bahianaise), nous écoutons le « Samba de Nego ». Plantons le décor : sur une place entourée de terrasses de restaurants trône au centre l’estrade d’un orchestre de samba payé par les restaurants de la place. La samba est de bon niveau, rythmée fortement par les 4 percussionnistes qui accompagnent les chanteurs et guitaristes. A Salvador, on pratique la Samba de Roda, très rythmée. Les passants, et parfois les convives des restaurants, se joignent vite aux danseurs. Il est difficile de rester statique face à un tel dynamisme.
Moqueca au poisson – poisson en sauce à l’huile de palme avec légumes et herbes, accompagné de riz, de farofa (farine de manioc que les Brésiliens mangent couramment comme pour remplacer le pain) et de vatapa (sorte de purée très bonne)
Le grand écrivain Jorge Amado, natif de Salvador (tout comme Gilberto Gil ou Caetano Veloso), le dit : « La tristesse est le seul péché mortel, car c’est le seul qui offense la vie ». A Salvador, apparemment, on aime la vie et la musique y joue son rôle. Toute la musique : toutes les variétés de samba, la bossa, le RAP, le jazz… La musique populaire brésilienne (MPB) est riche de beaucoup d’apports. Rythmée mais n’oubliant pas la saudade (nostalgie, mélancolie). Quelques bossas célèbres en mode mineur ont fait le tour du monde.
Je voudrais terminer par un hommage aux Brésilien-ne-s que nous avons rencontrés : le tout jeune Carlos notre guide à Morro de São Paulo, Deus de Marau, l’homme aux pommes d’amour à Sapinho, la dame qui a nettoyé la petite plaie d’Erell à Salvador, une restauratrice à Sapinho… Toujours autant de gentillesse, d’ouverture d’esprit pour des étrangers parlant mal leur langue et dont les prénoms sont difficiles à prononcer. On n’est pas si éloigné de la musique… Ne dit-on pas que la musique rapproche ?
Gérard.
Je complète cet article par quelques photos de Salvador. Flora.
5 réponses
Monique Neyret
Magnifique cet article, on entend d ici la musique. Merci Gérard
Mamilo
Très belles impressions, Gérard, exprimées dans un style superbe qui me donne envie d’écouter un peu de samba et de relire Jorge Amado. Je suppose que le retour aux pays des 365 fromages est proche !
Bises . Laurence
anne
on danse sur place avec tous ces beaux détails ! Bisous
Manou
Tu as raison Gérard, rien ne vaut la lecture de Jorge Amado et l’écoute de sa musique, de ses musiciens, pour entrer un peu dans la compréhension de ce Brésil si complexe – bon, la lecture date un peu pour ma part, va falloir que je fasse un tour à la bibliothèque, comme Laurence le dit !
Je me souviens, tu t’en souviens certainement, d’une très ancienne conversation avec Dominique qui nous expliquait le Candomblé, les orishas, je crois que c’était avant qu’il ne parte au Sénégal. Il était totalement subjugué, il me semble me souvenir qu’il avait rencontré Pierre Verger ou cherché à le rencontrer.
Alors donc, que Iémanja protège Penn Gwen et leur apporte plein de poissons !
francis ratti
des fruits , des danses , des aventures – – et de la pluie nous sommes eblouis par tout – – – et maintenant une grande balade dans les terres – – – que raconterez vous dans 6 jours ? et comment avez vous fêter l ‘ anniversaire de Melisse ?